Une chronique de Jean-Paul Marthoz
L’épidémie sonne comme un avertissement qui devrait amener nos sociétés, ceux qui les dirigent et ceux qui les composent, à s’interroger sur leur mode de fonctionnement et sur les risques qu’ils encourent à poursuivre leur « marche folle ».
Le risque est d’autant plus grand que le Covid-19 se répand alors que le monde est déjà au bord de la crise de nerfs et qu’il apparaît encore moins bien préparé à ce boomerang de la globalisation qu’en 2008, lors de la crise financière. « Au cours de cette dernière décennie, le monde est devenu plus autoritaire, nationaliste, xénophobe, unilatéraliste, anti-establishment et anti-science », constatent sombrement Thomas Wright, de la Brookings Institution, et Kurt Campbell, ex-secrétaire d’Etat adjoint de Barack Obama.
Bien plus encore que l’urgence climatique, car plus concrète, plus personnelle et plus immédiate, « cette épidémie pourrait être le premier test du mode de vie du 21e siècle, mettant à nu la fragilité cachée d’un système qui a longtemps semblé transparent », écrit Charlie Warzel dans le New York Times. Les questions fusent sur ce que l’on ne voulait pas vraiment voir : la dépendance excessive des économies européennes par rapport à la Chine ; les liens potentiels entre les nouvelles épidémies et l’urgence climatique et environnementale ; les défaillances des institutions de santé dans des Etats fragilisés ; les faiblesses des systèmes de sécurité sociale qui, dans de nombreux pays, (dont les Etats-Unis, comme le note Elie Mystal dans The Nation), risquent d’aggraver l’impact de l’épidémie et d’exacerber les tensions sociales en raison des inégalités dans l’accès aux soins.