On est allé dans la ville la plus au nord du monde et les effets du réchauffement climatique font froid dans le dos
Wolfgang Zach s'approche du rivage. Au bord du fjord, ce petit menuisier allemand désigne une canalisation qui sort de terre et qui poursuit son chemin sur plus d'un mètre au-dessus de l'eau. "Avant, ce tuyau ne dépassait pas comme ça, lance-t-il. Il y avait encore de la terre qui le couvrait." Le quinquagénaire aux fines lunettes se souvient de la violence de la tempête de l'automne 2016 et des vagues qui ont grignoté le rivage sur plusieurs mètres. Lui qui adorait prendre son petit-déjeuner en regardant les bélugas par la fenêtre a dû se résoudre à déplacer sa maison en bois à l'intérieur des terres, à l'abri de l'érosion.
A ses côtés, Kim Holmen prend garde de ne pas trébucher contre les gravats. Il connaît bien Longyearbyen, une petite ville de l'archipel du Svalbard, dans l'extrême nord de la Norvège. Ce barbu, directeur international de l'Institut polaire norvégien, lève les yeux vers les montagnes, situées à 60 km de l'autre côté du fjord. "Il y a 15 ans, vous pouviez traverser à pied ou en motoneige, soupire-t-il. Maintenant, l'eau du fjord n'est plus couverte de glace. Et donc il y a des vagues, d'où l'érosion." Dans ces contrées réputées pour leurs aurores boréales, Kim Holmen voit surtout des horreurs boréales.